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Contre vents et marées, la saison des récoltes démarre en Suisse
AGIR - Comment s'articulent généralement le temps des récoltes pour les travailleurs saisonniers engagés sur les exploitations de notre pays ?
Olivier Borgeat - La saison débute en avril avec les asperges et les premiers légumes. Elle se poursuit ensuite tout au long de l'année avec les fruits, les légumes, les grandes cultures, les estivages, la vigne et se termine en général avec les pommes en octobre-novembre.
De quels pays viennent les travailleurs que vous engagez habituellement ?
Majoritairement du Portugal, des pays de l'Est, de Pologne, mais également de Roumanie, de République tchèque, d'Espagne, d'Afrique.
Avec le Covid-19, comment vous organisez-vous pour recruter vos collaborateurs étrangers?
Nous sommes face à un double problème. Celui de la fermeture des frontières imposée par les différents gouvernements d'une part. Et d'autre part, les personnes qui refusent de venir travailler pour préserver leur santé et celle de leur famille.
Mais je suis confiant sur la saison à venir de production et de récolte car des solutions sont en train de se mettre en place. Et vous savez, le monde agricole est très pragmatique. Il a l'habitude de s'adapter aux situations qu'il rencontre !
Nous agissons sur deux axes essentiels. Le premier se situe au niveau fédéral. Les organisations faîtières de notre pays travaillent ensemble avec l'Union suisse des paysans (USP) et de concert avec les autorités fédérales, les offices de placement, bourses d'emplois pour permettre la poursuite des activités agricoles et l’approvisionnement des marchés et par conséquent garantir une main-d'oeuvre suffisante aux agriculteurs. Dans cet esprit, l'USP a par exemple lancé sur son site une plateforme de placement sur le modèle d’Agrix.ch et met à disposition un site dédié à toutes les questions pratiques autour du coronavirus, www.sbv-usp.ch/fr/la-crise-du-coronavirus-questions-et-reponses-pour-le-secteur-agricole .
L'autre axe se situe au niveau cantonal. Là également, toutes nos interprofessions travaillent en étroite collaboration avec la Chambre valaisanne d'agriculture, les centres de placement et autres organisations, et naturellement avec les autorités cantonales.
Si vous ne pouvez pas réunir toutes vos équipes de travailleurs saisonniers étrangers, quel sera votre plan B, si je puis m'exprimer ainsi ?
Nous pouvons d'ores et déjà compter sur des personnes habitants nos régions et qui sont par exemple au chômage actuellement ou qui ont du temps à nous accorder. Je discutais aujourd'hui encore avec des maraîchers qui m'ont dit que beaucoup de personnes se sont d'ores et déjà engagées à venir les soutenir. Plein de jeunes se sont aussi mis à leur disposition.
Comment cela se passe au niveau des salaires ?
Il est bien évident que les salaires que nous versons ne sont pas nécessairement les mêmes que dans d'autres branches. Mais là aussi, nous sommes en train de discuter de solutions possibles de compensation avec les organes compétents.
Et sur le plan de la sécurité sanitaire, comment les exploitations font-elle pour éviter tout risque inutile de propagation du Covid-19 ?
Au niveau logistique et des transports, chaque exploitant doit pouvoir, à son niveau, garantir la sécurité des collaborateurs qu'il engage et respecter les consignes exigées par nos autorités.
Là aussi, nous sommes confiants.
Pour conclure, changeons de sujet : comment s'annonce la saison 2020 sur le plan de la production, des récoltes, des cultures ?
En Valais, nous devons ces jours-ci faire face à une période de gel pendant la nuit, ce qui est ennuyeux car les abricotiers sont en fleurs. Bien évidemment, cela ajoute du stress supplémentaire.
Sinon, globalement, le début de la saison est plutôt bon avec une belle récolte d'asperges à l'horizon. Au niveau du marché, il faudra cependant que nous prenions en compte le fait que nous ne pourrons pas compter, cette année, sur les restaurateurs qui représentent pourtant une grosse part de notre clientèle. Il faudra donc que nous compensions en favorisant par exemple la vente directe.
Au niveau des autres légumes, la demande est soutenue et nous constatons un regain de confiance des consommateurs pour les produits du terroir. Ce qui est une bonne nouvelle.
Mais au vu de la situation actuelle, nous nous attendons à un supplément de travail au niveau logistique et structurel pour assurer la vente de notre production en toute sécurité. Mais nous sommes prêts à y faire face.
Propos d'Olivier Borgeat recueillis par AGIR