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Comment le Valais sera pénalisé par deux initiatives extrêmes ?
Le Valais, grand perdant de ces initiatives
Les deux initiatives menacent d’un énorme changement structurel tant l’agriculture que l’industrie de transformation alimentaire en Valais.
Interdire les produits phytosanitaires ou les réduire drastiquement aura un fort impact sur le rendement de nombreuses productions, en particulier pour l’emblématique abricot. Sa culture est économiquement impossible sans phytosanitaires de synthèse : les récoltes en culture bio sont aléatoires et les volumes chutent de 50 à 65% par rapport aux vergers non-bio.
La production de Raclette du Valais AOP est aussi en danger. En montagne et sur les alpages, on ne peut pas cultiver toutes les plantes nécessaires pour l’alimentation équilibrée des animaux. En interdisant d’acheter des fourrages, ces initiatives vont décimer les troupeaux et réduire la production de lait.
Les deux initiatives n’apportent pas de solution praticable aux risques qu’elles souhaitent minimiser. Président de la Chambre d’agriculture, Willy Giroud a imagé leurs excès en transposant les textes sur les médicaments qui sont aux humains ce que les phytosanitaires sont aux plantes :
• l’initiative « Eau potable propre » interdirait aux médecins de prescrire des médicaments s’ils veulent que leurs prestations soient prises en charge par l’assurance maladie ;
• l’initiative « Pour une Suisse libre de pesticides de synthèse » autoriserait les médecins à prescrire uniquement des produits homéopathiques.
Quel médecin et surtout quel patient accepterait ces « solutions » ?
Le plus iconoclaste dans ce débat, c’est que la qualité de l’eau potable en Suisse est bonne, selon l’Association suisse des chimistes cantonaux qui a mené en 2019 une vaste campagne d’analyses de l’eau potable dans tout le pays.
Sécurité sanitaire et qualité alimentaire
Les produits phytosanitaires sont soumis en Suisse à des critères d’homologation stricts. Ils sont autorisés s’ils n’ont aucun effet secondaire notable sur l’être humain et l’environnement. Ils sont périodiquement réexaminés. L’industrie alimentaire (filière carnée, fromagère) a absolument besoin des biocides de synthèse pour respecter les normes d’hygiène et garantir une qualité sanitaire irréprochable. Sans eux, la conservation des aliments sera écourtée et les pertes au stockage ou durant les transports augmenteront.
Les 2 initiatives conduiront à importer davantage de nourriture. Des aliments de qualité inférieure se retrouveront dans nos assiettes, car les conditions de production à l’étranger ne rivalisent pas avec les normes suisses en matière d’écologie et de bien-être animal.
Perte de souveraineté et tourisme d’achat
« Eau potable propre » détruira notre production végétale et animale. « Pour une Suisse sans pesticides de synthèse » imposera une agriculture 100% bio alors que les aliments bio occupent 11% du marché. Elle condamnera aussi des cultures en Suisse. En cas d’acceptation de ces textes, Agroscope a démontré que le taux d’autosuffisance passera de près de 60 % aujourd’hui à moins de 40 %. En période de conditions d’importation difficiles et d’incertitudes, comme c’est le cas actuellement avec la pandémie, la sécurité de l’approvisionnement alimentaire de la Suisse sera compromise. Les deux initiatives favoriseront les importations, avec un bilan environnemental global négatif. Elles bafouent le principe de la sécurité alimentaire plébiscité par le peuple et les cantons en 2017.
Comme les nouvelles réglementations prévues par ces initiatives ne seront valables que dans notre pays et que le prix des denrées alimentaires prendra l’ascenseur, le tourisme d’achat augmentera. Canton frontalier, le Valais sera particulièrement touché.
Moins de choix, moins d’emplois
Les consommatrices et consommateurs n’auront plus aucun choix et devront s’approvisionner avec des « produits labellisés », conformes aux nouvelles exigences des initiatives.
L’interdiction de tout produit phytosanitaire ou des phytosanitaires de synthèse ainsi que l’utilisation exclusive du fourrage produit sur l’exploitation renchériront les coûts pour les fermes suisses. Simultanément, l’offre indigène de sucre, d’huile, de viande, de fruits à noyaux se raréfiera, car les récoltes chuteront de 70 à 100%. L’augmentation des coûts et la réduction de l’offre se répercuteront sur les prix des denrées alimentaires indigènes en magasin et en restauration. De nombreux produits d’origine suisse ne resteront accessibles qu’aux personnes les plus aisées. La Suisse sera confortée comme « îlot de cherté ».
En outre, l’industrie alimentaire sera forcée à utiliser des matières premières bio. Par exemple, elle devra accaparer 21% de la production biologique mondiale pour le café et 50% pour le cacao, ce qui sera impos-sible. Elle délocalisera ses usines de capsules de café et de chocolat. Des milliers d’emplois sont en jeu.
Le secteur agricole n’a pas attendu ces deux initiatives
Les agricultrices et agriculteurs de ce pays sont conscients depuis plus de 40 ans des problématiques soulevées par ces deux initiatives. Le concept de l’agriculture intégrée ou raisonnée est né en Suisse !
Le recours aux produits phytosanitaires diminue dans notre pays. Depuis 2008, leurs ventes ont reculé de 13%. Celles de glyphosate ont même chuté de près de deux tiers. Alors que les ventes des phytosanitaires biologiques ont augmenté de plus de 50%, celles des produits autorisés en agriculture raisonnée et conventionnelle ont baissé de 40%.
Ces tendances vont s’intensifier. Le Parlement a promulgué ce printemps une nouvelle législation stricte sur les produits phytosanitaires. Elle impose d’ici 2027 la réduction de 50% des risques liés à l’utilisation des phytosanitaires ainsi qu’un recul des pertes d’éléments fertilisants. Ces objectifs passeront par une diminution des quantités de produits utilisés.
Renseignements
Willy Giroud, Président CVA, 079 / 597 55 21 willy.giroud@clutterstaehler.ch
Pierre-Yves Felley, Directeur CVA, 076 / 427 10 30 direction@clutteragrivalais.ch
Vincent Riesen, Directeur CCI-VS, 078 / 698 53 09 vincent.riesen@cluttercci-valais.ch
www.non-initiatives-phytos-extremes.ch