Main Content
Mercosur: Paris et Rome contrarient les plans de l'Union européenne
17.12.2025 – L'Italie a rejoint la France mercredi pour réclamer un report de l'accord commercial entre l'Union européenne et le Mercosur, Cela risque d'empêcher Ursula von der Leyen de parapher ce traité au Brésil en fin de semaine.
Une signature dans les prochains jours est "prématurée", a lâché Giorgia Meloni à la veille d'un sommet européen à Bruxelles. La cheffe du gouvernement italien veut d'abord des garanties "suffisantes" pour le secteur agricole et se dit "convaincue qu'au début de l'année prochaine, toutes ces conditions seront réunies".
Cette sortie est une douche froide pour la Commission européenne. Bruxelles n'a cessé de marteler ces derniers jours qu'une signature était indispensable avant la fin de l'année, pour la "crédibilité" de l'Union européenne et pour ne pas contrarier les partenaires latino-américains.
Prudent, l'exécutif européen veut encore y croire. "Les chefs d'Etat et de gouvernement vont en discuter au sommet européen" ce jeudi, a expliqué à l'AFP Olof Gill, porte-parole de la Commission. Au Brésil, le président Lula espère encore une "bonne nouvelle" et a appelé Emmanuel Macron et Giorgia Meloni à assumer "leurs responsabilités", pour ne pas empêcher un accord.
Position décisive
Mais la position de Rome sur ce dossier est potentiellement décisive. Avec la France, la Pologne et la Hongrie, l'Italie est en capacité de former une minorité de blocage au sein des 27 qui empêcherait un examen de l'accord durant la semaine. "Ca risque d'être très chaud", convient un diplomate européen anonymement, alors que l'Allemagne comme l'Espagne avaient insisté pour approuver ce traité de libre-échange le plus vite possible.
Emmanuel Macron a en tout cas prévenu que "la France s'opposerait de manière très ferme" à un éventuel "passage en force" de l'Union européenne, a rapporté la porte-parole du gouvernement Maud Bregeon mercredi. Avant le sommet de Bruxelles, la France ne considère pas encore comme "acquis" le report de la signature du traité, a-t-elle précisé, mais les déclarations de Giorgia Meloni sont la "preuve" que "la France n'est pas seule".
Manifestation à Bruxelles
La présidente de la Commission européenne, Ursula von der Leyen, espérait parapher ce traité lors du sommet du Mercosur samedi dans la ville brésilienne de Foz do Iguaçu. Mais elle a besoin au préalable de l'aval d'une majorité qualifiée d'Etats membres à Bruxelles. "J'espère qu'elle a un billet (d'avion) remboursable", glisse une source diplomatique européenne.
Cet accord commercial avec l'Argentine, le Brésil, le Paraguay et l'Uruguay créerait la plus grande zone de libre-échange au monde. Il permettrait à l'UE d'exporter davantage de véhicules, de machines, de vins et de spiritueux vers l'Amérique latine, tout en facilitant l'entrée en Europe de la viande bovine, du sucre, du riz, du miel et du soja sud-américains, ce qui alarme les filières.
Les agriculteurs européens ne décolèrent pas. Ils promettent une dizaine de milliers de manifestants jeudi à Bruxelles pour s'opposer à ce traité de libre-échange. Une mobilisation a déjà eu lieu mercredi à l'aéroport de Liège avec quelques centaines de personnes et une dizaine de tracteurs selon les organisateurs.
A Strasbourg, devant le Parlement européen, une centaine d'agriculteurs se sont aussi rassemblés. Pour rassurer la profession, l'Union européenne a ajouté des mesures de sauvegarde: un suivi des produits sensibles comme le boeuf, la volaille ou le sucre et une promesse d'intervention en cas de déstabilisation du marché. Ces mesures devaient encore faire l'objet de négociations mercredi soir entre Etats membres et Parlement européen.
Craintes
Elles ne devraient toutefois pas suffire à la France. Le bras de fer avec Bruxelles s'inscrit dans un contexte de vaste mobilisation agricole dans l'hexagone contre la gestion de l'épidémie de dermatose nodulaire contagieuse (DNC). Et au sein de l'Union européenne, une série d'Etats redoutent que la France ne se contente pas d'un report du Mercosur mais essaye de faire échouer le traité, malgré plus de 25 ans de négociations.
Allemands, Espagnols et Scandinaves comptent quant à eux sur cet accord pour relancer une économie européenne à la peine face à la concurrence chinoise et aux taxes douanières des Etats-Unis. Et à la fin, c'est encore l'Italie qui devrait jouer les arbitres.
Auteur : ATS/AFP
