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Toujours plus de cigognes en Suisse
19.04.2018 – Alors que certaines cigognes ne migrent plus en hiver, un projet de recherche devrait livrer des informations sur les raisons qui poussent ces oiseaux à se sédentariser.
(ATS/AGIR) - Plus d'un millier de cigognes vivent en Suisse, un record, de mémoire d'homme, d'autant plus remarquable qu'il y a 70 ans, l'espèce y était considérée comme quasi éteinte. Sur les plus de 1000 cigognes qui ont passé l'été dernier en Suisse, les spécialistes ont recensé quelque 470 adultes vivant en couple, dont 370 parents, et 757 jeunes.
Il faut d'abord voir dans cette évolution les efforts des passionnés de cet oiseau emblématique. Dès l'après-guerre sous la houlette de Max Bloesch, des cigognes algériennes ont été réintroduites en Suisse. Peu à peu, d'autres amateurs du migrateur ont créé les conditions propices à son installation. Mais cela n'explique pas une telle croissance de leur population. Leur mortalité a également diminué, ce que certains spécialistes expliquent par un changement dans le comportement migratoire de l'oiseau, devenu plus flexible. Certains n'entreprennent carrément plus leur grand voyage vers le sud à l'approche de l'hiver, tandis que d'autres en réduisent la distance. Il est aujourd'hui très rare qu'une cigogne passant l'été en Suisse migre jusque dans le Sahel africain, sa zone de villégiature originelle. Celles qui partent ne volent pas plus loin que dans le sud de l'Espagne ou au Portugal. Elles savent qu'elles y trouveront à manger dans des décharges publiques à ciel ouvert, a indiqué à l'ats Peter Enggist, directeur de la Société Cigogne Suisse, qui a succédé à son fondateur Max Bloesch.
L'hiver dernier, près de 360 cigognes ont renoncé à migrer, d'après un décompte de Cigogne Suisse. Pour certaines d'entre elles qui sont baguées, c'était une nouvelle expérience, car elles ont été identifiées en Espagne par le passé. Un projet de recherche devrait livrer des informations sur les raisons qui poussent ces migrateurs à se sédentariser. Personnellement, Peter Enggist avance sa propre hypothèse, basée sur le fait que la distance de migration est génétiquement programmée. Or, comme les cigognes introduites en Suisse après-guerre sont d'origine algérienne, elles migrent sur une distance plus courte, celle séparant l'Algérie de l'Afrique centrale étant équivalente à celle entre la Suisse et l'Espagne ou le Portugal.
L'expérience accumulée par chaque oiseau joue certainement aussi un rôle, estiment encore les spécialistes sur la base des constats de Cigogne Suisse et de la Station ornithologique de Sempach (LU). Selon ceux-ci, les cigognes les plus âgées migrent le moins. Leur vécu leur permet de trouver plus facilement de la nourriture dans des conditions hivernales qu'un jeune oiseau inexpérimenté, a dit à l'ats Livio Rey, de la Station ornithologique. Et elles savent qu'en passant l'hiver à demeure, elles bénéficient d'un avantage sur celles qui migrent. Sachant que les cigognes sont non seulement fidèles en couple mais aussi à leur nid, celles qui restent évitent de se le faire prendre par une rivale. Il ne reste aux plus jeunes qu'à construire leur propre nid.
Les associations qui s’occupent des cigognes et de leur recensement doivent aujourd’hui multiplier leurs efforts en matière d'aménagement de cadres de vie propices à la reproduction et offrant de la nourriture en suffisance. Des territoires agricoles exploités de manière extensive ou des zones marécageuses revitalisées sont à ce titre idéaux. Il s'agira aussi de veiller à réduire les dangers qui déciment les cigognes, à l'image des lignes à haute tension et autres câbles ou, plus récents, des pâles des éoliennes qui échappent à leur vue. Sans compter le danger que représente l'homme lui-même. L'oiseau figure ainsi toujours sur la liste rouge des espèces menacées.
Auteur : ATS/AGIR
