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Les articles d'AGIR
Agri fête cette année les vingt ans de son titre!
Karine Etter, si vous deviez résumer l’histoire d’Agri et son évolution au fil de ces vingt dernières années ?
L’évolution d’Agri est à la fois une longue histoire de continuité et de changement. Continuité dans le sens où Agri conserve depuis plus de cent ans sa mission première de journal agricole professionnel puisque son public cible est représenté par les agriculteurs et les professionnels de la terre. Le changement est lié quant à lui à l’agriculture elle-même qui est toujours en mouvement, aux dossiers qu’elle porte, aux débats qu’elle engendre, à la somme d’informations qu’elle véhicule. Il est aussi structurel puisque nous vivons de l’intérieur l’érosion du nombre d’exploitations, qui se répercute sur celui de nos abonnés. Agri s’est aussi adapté aux évolutions techniques dans les médias : informatisation, rationalisation des processus de fabrication, digitalisation, site internet, applications, et a beaucoup gagné en termes d’efficacité. Nous avons vécu deux changements de maquette et trois changements de logo. Sur le plan rédactionnel, nous traitons de plus en plus d’informations. Outre le cahier consacré à des dossiers agronomiques détaillés, nous avons des pages qui sont en prise directe avec l’actualité, la vie des associations, et nous suivons la politique agricole de près. Nous sommes passés du stade de presse associative à une presse clairement journalistique. Agri s’est renforcé comme outil d’information, de vulgarisation, de conseil et de service.
Pour les vingt ans du journal, la ligne graphique et la mise en page ont été modifiées. Quel a été le processus et que pensent les lecteurs du résultat ?
L’idée initiale était de moderniser notre logo, d’avoir une ligne plus épurée et à travers ce dernier, de rafraîchir l’image du titre. Les vingt ans du journal sous le nom d’Agri étaient l’occasion idéale pour concrétiser ce projet. Par effet de cascade, nous avons harmonisé la ligne graphique du journal, notamment au niveau des couleurs. Ces changements n’ont pas provoqué énormément de retours de la part de nos lecteurs, preuve qu’ils se sont rapidement habitués à ce nouveau look. Les commentaires ont été en général positifs: plus frais, plus clair, plus moderne.
Votre site a été modernisé et une application a été réalisée… Tout cela a-t-il modifié les habitudes de vos lecteurs ?
Suite à la nouvelle ligne graphique du journal papier, nous avons profité de restructurer le site afin qu’il ne soit pas simplement la copie du journal. Nous y proposons notamment un suivi quotidien de l’actualité agricole, des dossiers agronomiques en libre accès et une galerie photos. Globalement, la majorité des abonnés âgés de 40 à 70 ans restent attachés à la version papier. Nous avons près de 800 abonnés (sur un nombre total d’environ 9500) qui ont demandé un accès à la version électronique e-paper, plus de 1000 ont téléchargé l’application Agri lancée cette année. Et la tendance est en augmentation. Notre site enregistre par ailleurs 100 à 200 visites par jour.
De moins en moins de paysans et, inexorablement, moins d’abonnements… Existe-t-il encore des agriculteurs qui ne sont pas abonnés dans certains cantons ?
L’érosion de notre nombre d’abonnés est d’environ 2% par année et correspond au recul du nombre d’exploitations en Suisse. Ces pertes sont par ailleurs limitées grâce à l’arrivée régulière de nouveaux abonnés. Il y a des régions, comme le Valais ou l’arc Jurassien, où nous avons une petite marge de progression, ainsi que dans certaines professions comme les maraîchers, les producteurs de fruits ou la vitiviniculture.
Côté publicité, Agri est-il en phase avec la presse en général ou fait-il mieux face à la baisse des annonceurs?
Si, depuis quelques années, Agri doit composer avec une baisse du volume publicitaire, cette diminution est nettement moins marquée que dans la presse quotidienne. Avec notre journal, les annonceurs atteignent directement leur cœur de cible, ce qui est un atout majeur. Nous avons un taux de pénétration élevé auprès des familles paysannes romandes, de 95 à 98%. Par ailleurs, pour les campagnes publicitaires nationales, nous travaillons en pool avec le BauernZeitung pour couvrir l’ensemble des exploitations suisses.
L’Agri est l’organe officiel d’information du monde rural des cantons francophones et ses actionnaires sont les organisations agricoles. Qu’est-ce que cela implique pour la rédaction?
La rédaction doit tenir compte des informations que les organisations agricoles veulent communiquer à leurs membres car Agri a une vocation de défense professionnelle et sert de relais d’information pour les organisations. Mais cette mission n’empêche pas de se montrer critique et de refléter la diversité d’opinion qui s’exprime dans le monde agricole. Statutairement, la rédaction en chef dispose d’une totale indépendance. Les sociétaires n’interviennent pas pour dicter le contenu d’un article ou imposer le choix d’un sujet. Nous désirons être une plate-forme de débats.
Comment jugez-vous la qualité de lecture de vos abonnés ? Et quelles sont les rubriques les plus lues ?
Agri est dans les boîtes aux lettres le vendredi et nous avons un taux de lecture élevé, d’une heure environ (10 minutes pour la presse quotidienne). Dans le même foyer, on touche 3 à 4 personnes. Les agriculteurs aiment découvrir ce que font leurs pairs. Les pages «Marchés», les dossiers et articles techniques, agronomiques sont très suivis, de même que les portraits en Der et de la rubrique «Terre d’Elle». Les lecteurs apprécient aussi les articles sur la politique agricole et l’actualité paysanne régionale.
Rédactrice en chef, c’est bien sûr motivant. Et directrice ?
Les deux sont motivants. C’est aussi une gageure en termes d’organisation. Je regrette parfois de ne pas avoir assez de temps pour réfléchir plus longuement à des projets, créer de nouveaux concepts visant à faire évoluer encore davantage le titre. Parfois, j’aimerais aussi pouvoir échanger des idées avec d’autres directeurs de publications proches de notre hebdo. En tant que journaliste, je suis malheureusement moins sur les exploitations. J’ai en revanche plus de contacts avec les organisations agricoles et l’institutionnel. Et puis j’ai beaucoup de satisfaction à être en phase avec notre lectorat, à présenter des comptes positifs dans un contexte de plus en plus difficile, à travailler à la concrétisation de projets comme le site internet. J’ai aussi du plaisir à collaborer avec une équipe qui s’implique, se sent concernée par la qualité de notre journal.
En 1996, en revenant d’Afrique où vous avez été déléguée à la Croix-Rouge, vous rêviez de repartir en tant que grand reporter. Mais après votre stage de journalisme au Journal de Morges, vous êtes engagée à Agri en 1999. Pas de regrets ?
Non, aucun regret! Chaque étape de vie est riche parce que différente. Devenir grand reporter relevait davantage du fantasme que d’une vraie ambition. Le Journal de Morges m’a permis de retrouver un ancrage local après trois ans passés à l’étranger. Avec Agri, la découverte du monde paysan s’est révélée passionnante et continue de l’être car c’est un secteur qui touche à tellement de domaines essentiels: nos racines, notre subsistance, nos valeurs… Je trouve intéressant d’être en phase avec une région par le biais de la terre, d’autant plus que mon grand-père était paysan et que j’ai passé des vacances d’été sur la ferme inoubliables; c’est en quelque sorte un retour aux sources…
Propos recueillis
par Armande Reymond/AGIR
Un peu d’histoire…
Agri est l’hebdomadaire professionnel agricole de Suisse romande. Sa tâche est d’informer la population paysanne des événements et des évolutions politiques, économiques, techniques et scientifiques du monde agricole. Il est tiré à 9'881 exemplaires et compte 9'014 abonnés. Il est financé moitié-moitié par les abonnements et la publicité. Il ne reçoit aucune contribution des sociétaires ni de subventions des collectivités publiques. Les actionnaires sont les Chambres d’agriculture de Suisse romande, AGORA, la Coordination des paysannes romandes, l’Union suisse des paysans, la Fédération des producteurs suisses de lait, fenaco. Le comité d’Agri est présidé par Yves Pellaux, ancien président de Prométerre. Il compte un représentant par organisation sociétaire. La presque totalité des membres du comité sont des agriculteurs ou des agricultrices.
Agri est né des anciens titres Agri-Hebdo et Le Producteur de Lait, de la Fédération des producteurs suisses de lait /FPSL (fin 1994), avec pour but d’assurer la communication entre les associations, cantonales et nationales, sociétaires du journal et leurs membres de langue française. L’origine de cette publication remonte cependant à 1868 quand 300 paysans fondent la Société vaudoise d’agriculture et de viticulture (SVAV) et créent dans la foulée le Bulletin agricole. Puis, de fusion en fusion, l’organe professionnel devient La Terre vaudoise en 1909, puis la terre romande en 1967 où il s’impose comme outil de communication officiel des Chambres d’agriculture des cantons de Vaud, Genève, Neuchâtel, Jura et Jura bernois. En 1991, terre romande et Agri-Journal, de l’Union des paysans fribourgeois, s’unissent pour devenir Agri-Hebdo. En 1994, lors d’une ultime fusion, le nom d’Agri est adopté et paraît au premier numéro de 1995.
La rédaction centrale d’Agri est basée à Lausanne. Outre la direction, elle se compose de sept journalistes professionnels, dont un est à Berne, de deux polygraphes à la composition et d’un secrétariat avec deux collaboratrices à temps partiel. Agri peut également compter sur un réseau d’une trentaine de correspondants dans toute la Suisse romande.
Les directeurs – rédacteurs en chef depuis vingt ans: Claude Quartier (1987 à 2005); Christian Pidoux (2005 à 2011); Karine Etter (prise de fonction en 2011).
