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La crise du lait et la météo malmènent les agriculteurs jurassiens
Dans un marché du lait toujours sous pression en 2016, la fusion entre les fédérations de producteurs Miba et Nordostmilch reste l’événement majeur de l’année écoulée, a rappelé Philippe Jeannerat en introduction du rapport d’activité de la Chambre jurassienne d’agriculture. «La CJA a soutenu la création de la société Mooh en juin dernier. Regrouper l’offre devenait impératif pour placer notre lait dans les meilleures conditions possibles sur les marchés. Par contre, avec une vision basée sur l’exportation et une libéralisation des quantités: difficile de croire que Mooh parviendra à apporter une vraie amélioration du prix du lait», a souligné le président de la CJA.
Evoquant de manière plus générale la politique agricole, Philippe Jeannerat a estimé que certaines décisions prises par les «têtes pensantes» à Berne «manquaient singulièrement de vision». Il a rajouté que si le secteur agricole ne pouvait pas être épargné par certaines restrictions budgétaires cantonales ou fédérales, les décisions d’économie devaient préserver autant que possible le revenu des familles paysannes. Dans cet objectif, a-t-il souligné, les représentants de la CJA, par l’intermédiaire d’AGORA et de l’Union suisse des paysans (USP), s’efforçaient de multiplier les partenariats pour appuyer les revendications spécifiques à l’agriculture jurassienne.
Dans son message, le président s’est aussi inquiété de la météo, soulignant que si les sécheresses continuent de s’intensifier, l’agriculture jurassienne pourrait subir d’importantes mutations: «L’heure n’est pas encore à la panique mais le moment est venu de se préoccuper de l’approvisionnement en eau de certaines fermes isolées ou, à plus long terme, du choix de certaines cultures résistant à un climat sec. Ceci pourrait devenir l’un des prochains défis de la recherche agronomique suisse même si, pour l’instant, seul l’Arc jurassien est vraiment touché par le phénomène.»
La filière lait en chiffres
Malgré les fluctuations saisonnières, le prix du lait est resté à un niveau extrêmement préoccupant en 2016, a confirmé le directeur Michel Darbellay. Sur douze mois, le lait d’industrie s’est vendu en moyenne à 54 ct par kilo, alors que le prix pour le lait destiné au Gruyère AOP était de 79,1 ct, pour la Tête de Moine AOP de 74 ct et pour le lait de centrale bio 77 ct.
La production laitière, qui se répartit entre 45% des exploitations, demeure encore la colonne vertébrale de l’agriculture jurassienne puisqu’en 2016 le Jura totalisait 432 producteurs de lait parmi lesquels 301 ont livré à l’industrie et 131 aux fromageries. Ils ont produit 94,5 millions de kg, un résultat qui se situe dans la moyenne des dix dernières années, dont 24,6 millions pour les fromageries.
Comme l’explique le directeur dans son rapport, sur le plan individuel, le producteur n’a souvent pas d’autre choix que de produire davantage pour compenser le bas niveau du prix. En 2016, la moyenne était de 218'822 kg par exploitation (210'694 kg en 2015, 187'465 kg en 2013 et 152’650 en 2007). Force est de constater cependant que toujours plus d’exploitations abandonnent la filière. A titre de comparaison, elles étaient encore 595 en 2007, 515 en 2012, 488 en 2013 et 449 en 2015.
Productions et réseaux
Michel Darbellay a rappelé que le Jura a souffert l’année dernière des effets conjugués d’un printemps pluvieux suivi, pour la deuxième fois consécutive, d’un été caniculaire et sec, ce qui a notamment eu pour conséquence de retarder les semis de maïs entre fin avril et mi-mai et de prétériter la qualité des herbages. Plus tard dans la saison, la sécheresse a même contraint bon nombre d’agriculteurs à affourager leurs bêtes, les obligeant à prélever sur leurs réserves de foin déjà mises à mal suite à l’été caniculaire de 2015. Les aléas climatiques ont également eu un impact négatif sur le rendement et la qualité des céréales fourragères et panifiables si bien qu’une partie de ces dernières a dû être déclassée en céréales fourragères. Les betteraves, dont le taux de sucre était bon, ont aussi enregistré une baisse au niveau des rendements.
S’agissant du marché de la viande, et contrairement à d’autres secteurs de production, les prix du marché du bétail de transformation se sont situés à un très bon niveau, dans le prolongement des dernières années. Le nombre de bovins commercialisés en 2016 s’est élevé à 4’064 bêtes, soit 5% de plus que l’année précédente.
La CJA totalisait par ailleurs 11 réseaux écologiques en 2016, dont la mise en œuvre a été confiée à la Fondation rurale interjurassienne (FRI) et auxquels ont participé plus de 600 agriculteurs. Ainsi, 3'512 ha de surface de promotion de la biodiversité ont permis le versement de 2,8 millions de contributions, soit une hausse de 80'000 francs par rapport à l’année précédente.
«On remarque que de plus en plus d’exploitations font le choix du bio. On en comptait 136 en 2016 et 19 reconversions sont annoncées pour cette année. Si la valeur ajoutée des produits bio attire, force est de constater aussi que les conditions de production jurassiennes ainsi que l’assolement conviennent particulièrement bien à la production biologique. Le Jura affiche ainsi la plus forte progression dans le bio mais il est essentiel que les valeurs qui font le succès de ce mode de production soient respectées», a également souligné Michel Darbellay.
Entraide et promotion
Le 1er janvier 2016, la Chambre a lancé Terrentraide Sàrl. Ce service de dépannage agricole en cas de congés, d’accident, de décès, de maladie ou d’absence d’employés, comptait 25 abonnés à la fin de l’année. Douze dépannages ont eu lieu l’année dernière pour des missions d’un jour à deux mois, soit 77 jours au total. Ce soutien a concerné uniquement des exploitations de production laitière et dans 75% des cas, le dépanneur était seul à assumer les travaux sur la ferme.
Les actions de promotion de l’agriculture gagnent en importance, à l’exemple de l’Espace agricole à la Foire du Jura, que la CJA a organisé pour la 3e fois en 2016. Et pour clore ce tour d’horizon, Michel Darbellay a rappelé le succès remporté par le Brunch à la ferme du 1er Août grâce à sept exploitations qui ont accueilli pas moins de 1’800 convives.
AGIR
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