Main Content
Les articles d'AGIR
Protéger les AOP-IGP et garantir une traçabilité fiable !
« Pour les consommateurs et producteurs, l’AOP (Appellation d’origine protégée) et l’IGP (Indication géographique protégée) doivent être les garantes d’un produit de qualité, authentique et goûteux, dont la traçabilité ne laisse aucun doute », a expliqué Géraldine Savary. Chacune de ces spécialités doit être protégée efficacement contre les fraudes, imitations et usurpations, sur notre territoire ainsi qu’à l’étranger. Lors de cette journée en terre jurassienne, qui a débuté à la fromagerie historique de Bellelay, la présidente de l’Association suisse des AOP-IGP a aussi rappelé que la Suisse, selon les accords bilatéraux conclus, a le devoir de veiller à l’intégrité des AOP-IGP étrangères commercialisées sur notre sol. « Nous devons respecter nos engagements aussi bien pour les produits suisses que les produits étrangers disponibles chez nous, en effectuant des contrôles de qualité stricts et réguliers », a souligné Alain Farine, directeur l’association.
Dépôt d’un postulat
Ce sont essentiellement les cantons qui sont chargés de l’exécution et du contrôle de l’application de la législation en matière de denrées alimentaires. Cependant, face à la croissance sur le marché suisse et international du nombre et du volume de spécialités arborant l’un des deux signes distinctifs de qualité, Géraldine Savary a annoncé, lors de cette rencontre, avoir déposé un postulat demandant au Conseil fédéral d’établir un état des lieux sur les fraudes détectées et les sanctions appliquées, tant sur notre territoire qu’à l’étranger. Et la conseillère aux Etats de préciser que « cette lutte contre les fraudes est devenue un enjeu de première importance pour les producteurs, les consommateurs, l’image de la Suisse, ainsi que pour perpétuer des saveurs traditionnelles».
A la rencontre des producteurs
Lors de cette journée, trois producteurs ont chaleureusement ouvert les portes de leur entreprise. Suivez le guide !
La Tête de Moine AOP :
Menno Amstutz a fait découvrir l’entreprise familiale et les différentes étapes de fabrication et d’affinage de ce fromage légendaire à base de lait cru. Cette délicieuse spécialité - qui ne se coupe pas mais dont on racle la surface pour obtenir de petites rosettes - est présente sur bon nombre de tables suisses. Elle jouit également d’une immense notoriété à l’étranger.
Pour en protéger le secret de fabrication et débusquer les imitations, la filière Tête de Moine utilise depuis le début de cette année des cultures de certification d’origine, développées depuis 6 ans en collaboration avec Agroscope. Issues de microorganismes isolés dans le lait de la région d’origine ou dans le fromage lui-même, elles sont ajoutées pendant la fabrication, permettant ainsi, lors d’un test de paternité, de débusquer les copies.
En outre, en vertu de l’accord de reconnaissance mutuelle des indications géographiques entre la Suisse et l’UE permettant d’intervenir contre toute utilisation commerciale des dénominations protégées, l’interprofession met toute son énergie à préserver la valeur ajoutée de cette production ancestrale, dès que son nom est usurpé. Président de l’Interprofession Tête de Moine, Jacques Gygax a d’ailleurs souligné que « les fromageries artisanales sont très sensibles aux démarches entreprises par Berne ».
La filière Damassine AOP :
Sur son domaine fruitier à Porrentruy, Alain Perret cultive en particulier des damassiniers dont les fameuses petites prunes rouges servent à fabriquer l’eau-de-vie typiquement jurassienne. Le président de l’Association interprofessionnelle de la Damassine explique ce qui fait l’une de ses spécificités : « On ne secoue jamais l’arbre, on attend que les fruits mûrs tombent d’eux-mêmes. On les récolte alors tous les jours sur des filets déployés au sol. ».
Bien que distribuée essentiellement en Suisse, la Damassine AOP, dont la marque est propriété de l’interprofession, fait régulièrement l’objet de fraudes. Pour les combattre, l’interprofession chapeaute des opérations de contrôle qu’elle a confiées à un professionnel avant de les dénoncer aux chimistes cantonaux. Elle a également mis au point une stratégie juridique lui permettant de s’attaquer aux fraudeurs dont le volume de vente est important.
La Saucisse d’Ajoie IGP :
A Alle, Philippe Domon perpétue la tradition en fabriquant la fameuse spécialité ajoulote. Savant mélange de viande de porc et de lard hachés, elle est assaisonnée en particulier avec du cumin. Le président de l’Association des maîtres-bouchers du district de Porrentruy utilise d’ailleurs son propre cumin cultivé à quelques encablures de sa boucherie-charcuterie. La Saucisse d’Ajoie, explique Philippe Domon, est vendue en priorité en Suisse. Si sa dénomination est protégée, sa renommée fait cependant que plusieurs bouchers-charcutiers d’autres régions utilisent abusivement son appellation pour mettre sur le marché des contrefaçons dont certaines sont parfois médiocres. La vigilance, là aussi, reste de mise pour l’interprofession soucieuse de préserver l’image et les qualités gustatives de la véritable Saucisse d'Ajoie IGP.
Ne jamais baisser la garde !
Au gré de ce périple jurassien, les participants ont rencontré des producteurs fiers de leurs spécialités, de leur terroir et soucieux de conserver des goûts et des savoir-faire qu’ils sont déterminés à promouvoir et à défendre contre les fraudeurs. Ils sont d’ailleurs convaincus de l’importance d’être soutenus par les autorités suisses lorsqu’il s’agit de lutter contre des imitations et d’intervenir lors de toute utilisation commerciale abusive de dénominations. En revanche, ils émettent quelques réserves quant la collaboration fixée par la loi avec les chimistes cantonaux chargés des contrôles qui, selon eux, ne fonctionne qu’à sens unique. « Lorsqu’on dénonce un cas, on n’a jamais de retour quant aux mesures prises», résume Alain Perret.
AGIR
