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Les articles d'AGIR
Quand les agriculteurs vont en ambassade dans les écoles
Valentin Dougoud n’a que 25 ans mais, dans son cas et selon l’adage, la valeur n’attend pas le nombre des années… Son CFC et son brevet d’agriculteur en poche, il est en association avec son père Bernard et sa belle-mère Sandra pour gérer une exploitation de 49 ha, située à Ecublens /FR et sur laquelle il produit des céréales, du maïs, des prairies artificielles et naturelles. Mais l’essentiel c’est l’élevage de 60 vaches laitières et le coulage de 500'000 litres de lait industriel. Un apprenti complète l’équipe familiale ce qui permet d’assurer une permanence de deux personnes le week-end et de donner congé aux deux autres. Une respiration bienvenue lorsqu’on sait qu’une telle exploitation fonctionne 365 jours par année… A noter encore que Valentin Dougoud est syndic de son village depuis l’âge de 22 ans ce qui fait de lui le plus jeune élu à ce poste en Suisse !
Ce rapide tour d’horizon des activités de Valentin ne donne guère l’impression qu’il doive chercher des occupations. Dès lors, pourquoi s’engager dans une association dont les activités s’approchent davantage du bénévolat que du plan de carrière ? « J’ai assisté, à Grangeneuve en 2008, à une présentation de Sébastien Frossard, alors président d’Agro Image. Il cherchait du monde et cela m’a intéressé de m’impliquer dans ce programme. Je crois, en effet, que c’est très important pour l’agriculture de dialoguer avec les gens en général et avec les consommateurs de demain, en particulier. C’était aussi un défi pour moi car se retrouver devant une classe d’ados, ce n’est pas évident… ».
Et, justement, comment sont formés les agriculteurs qui interviennent et qu’elles sont leurs motivations ? « Le nouveau membre accompagne un ancien lors de sa présentation en classe et il est formé « sur le tas ». Cependant nous avons conçu des modules de cours pour étayer le propos. Il s’agit des modes de production, des labels et de la saisonnalité. »
Comment le dialogue se passe-t-il avec ces jeunes probablement assez éloignés des réalités agricoles ? « Le contact est très bon et on apprend beaucoup de choses les uns des autres. J’ai l’impression que mon objectif de mieux faire comprendre l’agriculture suisse et ses produits est atteint, en général. Mais il faut être préparé car les remarques sont souvent assez provocantes… » Par exemple ? « Des élèves me disent parfois qu’ils n’en ont rien à faire de l’agriculture et qu’on ferait mieux de tout importer de l’étranger parce que ça coûterait moins cher. » Et qu’est-ce que vous répondez ? « J’explique les méthodes de production, l’élevage respectueux des animaux, le fait qu’une production de denrées alimentaires de proximité implique peu de transports, que les paysages cultivés font la beauté de la Suisse, qu’on travaille beaucoup pour fournir des aliments sains et de qualité et que tout cela a un prix. Bref, je leur explique ma réalité de tous les jours… » Et ça marche ? « C’est super de leur faire découvrir plein de choses qu’ils ne savent pas ».
Combien d’agriculteurs actifs êtes-vous en Suisse romande pour assurer ce programme ? « Pas assez, c’est-à-dire cinq dont quatre Fribourgeois et une Vaudoise. C’est pourquoi, nous cherchons de nouvelles recrues en précisant qu’il n’y a pas de limite d’âge et que nous serions reconnaissants d’avoir également des agriculteurs qui ont peut-être moins de charges que les jeunes ».
Quels sont vos objectifs en la matière ? « Si on pouvait doubler le nombre de membres actifs en Suisse romande d’ici 2014, je serais soulagé et je pourrai ainsi proposer ces cours dans de nouveaux établissements scolaires. »
Combien de cours avez-vous donné en 2012 ? « Nous avons visité une bonne cinquantaine de classes, surtout dans le canton de Fribourg. En comparaison avec la Suisse allemande où on compte plus de membres, nous donnons beaucoup de cours. En effet, en 2012, il y a eu 210 classes visitées dans toute la Suisse, soit quelque 4'000 élèves. Ce qu’il y a de frustrant, c’est que nous pourrions avoir beaucoup plus d’interventions sur demande des collèges mais nous n’avons pas assez d’intervenants. Ensuite, il y a aussi le problème du budget car si nous pouvons compter sur un certain nombre de sponsors actuellement, nous devrions en trouver d’autres pour assurer la petite contribution remise aux intervenants.»
Malgré ces soucis, est-ce que vous êtes toujours motivé après quatre ans à Agro Image ? « Oui, car il y a de nombreux points positifs dans cet engagement. D’abord le réseau que nous avons mis en place nous permet des échanges fructueux entre les membres de l’association, puis avec les écoles, avec les organisations agricoles impliquées et nos sponsors. Mais surtout le contact avec les jeunes qui ne sont pas dans le milieu agricole nous apprend beaucoup et on espère bien que c’est réciproque. Et enfin, je crois fermement que c’est un engagement utile non seulement pour l’agriculture mais aussi pour toute la société. »
Propos recueillis par
Martine Bailly/AGIR
