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Le credo d’Yves Pellaux : « Revaloriser la production agricole ! »
L’année agricole 2012 a été caractérisée par des rendements moyens. Conséquence directe, une baisse de 1,9% de la valeur de la production agricole suisse à 9,974 milliards de francs. Une situation qui inquiète particulièrement Yves Pellaux, président de Prométerre : « La valeur de la production agricole est inférieure aux paiements directs perçus par les agriculteurs. En conséquence, le manque à gagner coûte 300 millions par année aux familles paysannes. Cette situation fait plonger le revenu net des entreprises agricoles. Nous devons absolument nous atteler à revaloriser cette matière première et à créer des filières de production de meilleure valeur ajoutée ».
Les bons arguments !
La promotion des produits enregistrés comme AOP ou IGP (28 actuellement) ; le développement de marques et labels régionaux ; le soutien à la vente directe à la ferme ou en ville, comme, par exemple, la Halle romande : autant d’actions démontrant que l’agriculture ne cesse d’innover et de se développer pour s’adapter à la demande : « Dans un univers marqué par une perte croissante des repères en matière de consommation, l’achat chez le producteur donne au consommateur la garantie d’avoir des produits de qualité et de proximité », constate Yves Pellaux. Et le président d’ajouter : « Acheter des denrées alimentaires issues d’une production respectueuse de l’environnement et des animaux répondant à des critères sociaux, c’est, pour le consommateur, un argument d’achat persuasif ! ».
Un argument percutant à mieux utiliser car, malheureusement, le prix est souvent l’élément prioritaire dans l’acte d’achat des consommateurs, déplore Yves Pellaux qui s’interroge : « Des côtelettes de porcs à 1 franc 29 les 100 grammes, une salade pommée à 99 centimes, 6 bouteilles de vin à 3 francs 99 la bouteille… Est-ce donc à cela qu’en est réduite notre alimentation ?». A cette question, le président de Prométerre souhaite que l’agriculture réponde fermement non et qu’elle se profile encore davantage dans le créneau de la qualité et de la proximité.
Swissness : rester vigilants !
En 2012, le Parlement fédéral s’est rallié finalement aux demandes de l’agriculture concernant le dossier Swissness. Il est désormais obligatoire pour un produit agricole transformé souhaitant arborer la croix suisse d’être constitué d’au minimum 80% de matières premières indigènes. Un succès cependant entaché d’une exception, voulue par les Chambres fédérales, soit prendre en compte le paramètre du taux d’auto-approvisionnement.
Un choix que ne comprend pas Yves Pellaux : « La production de matière première dépend de la demande et cette demande sera d’autant plus faible que l’on pourra s’affranchir, sous prétexte d’un taux d’auto-approvisionnement insuffisant, de l’exigence des 80% pour qualifier de suisse un produit agricole transformé. Ce Swissness pourrait donc faire baisser encore la demande et le taux d’auto-approvisionnement de certains produits agricoles, avec, pour conséquence, que l’industrie alimentaire pourrait bénéficier du prestige helvétique sans faire l’effort d’en payer le prix. Nous devons rester extrêmement vigilants sur ce dossier et dénoncer les abus s’il devait y en avoir ».
Boycott des OGM
En réaction à la mise en consultation par le Conseil fédéral de la possibilité d’utiliser des OGM dans l’agriculture, Yves Pellaux réagit sèchement : « Il serait totalement suicidaire de mettre sur le marché des produits dont personne ne veut, ni les consommateurs, ni les agriculteurs. De plus, les OGM n’apportent aucune réelle solution agronomique. Le régime de coexistence des deux filières, prévu par le Conseil fédéral, n’aurait pour conséquence que d’augmenter les coûts de production, déjà parmi les plus élevés au monde, et qui seraient principalement supportés par les producteurs ! ».
PA 2014-2017 : attentes déçues
Prenant la relève dans ce tour d’horizon des dossiers d’actualité, le directeur Luc Thomas passe à la Politique agricole 2014-2017 en soulignant que Prométerre n’a cessé de se battre, en collaboration avec l’Union suisse des paysans (USP), pour maintenir la compétitivité des activités de production par rapport aux prestations de type écologique.
« Le résultat n’est pas à la hauteur de nos attentes. Tant sur le plan de la nouvelle articulation des paiements directs que sur le plan de l’élargissement de la force obligatoire qui permettrait aux organisations de producteurs d’avoir une meilleure maîtrise de l’offre », précise-t-il. « Mais force est de constater qu’avec l’adoption sans contestation du crédit cadre de près de 14 milliards, l’agriculture suisse a reçu un signe de reconnaissance tangible de la valeur des prestations qu’elle fournit à la population suisse », concède néanmoins Luc Thomas.
Du danger d’un référendum…
Si Prométerre considère que la PA2014-2017 ne répond pas vraiment aux attentes du secteur primaire, lui opposer un référendum ferait plus de tort encore à l’agriculture suisse, estime le directeur. Conscient que les motifs de mécontentement dans la profession sont nombreux, il considère que cela ne résulte pas uniquement de la nouvelle Politique agricole mais bien d’une tendance datant de nombreuses années et influençant les politiques agricoles successives. Selon Luc Thomas, c’est donc bien le système qu’il faudrait changer car le conserver « ne garantira pas au monde paysan une évolution de la loi dans le sens souhaité ».
Mais le référendum pose un autre problème, selon le directeur de Prométerre. Au cas où les 50'000 signatures nécessaires seraient réunies, le référendum serait alors évidemment soumis au peuple et les référendaires seraient dans la très inconfortable position de convaincre la population que l’enveloppe globale de 14 milliards, légèrement supérieure à la situation actuelle, n’est pas répartie comme l’agriculture l’aurait souhaité… Et cela non seulement face à la plupart des forces politiques du pays mais aussi à la quasi-totalité des lobbys des consommateurs, protecteurs de la nature et des animaux, sans oublier les milieux économiques. « Le risque d’un désaveu populaire est bien réel et avec lui celui de perdre une part importante du capital de sympathie dont l’agriculture jouit dans l’opinion publique. C’est un risque que l’agriculture ne doit pas prendre », conclut Luc Thomas.
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