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Mercosur, initiatives et PA 22+: l'USP demande de la cohérence
Comme chaque début d’année, l’Union suisse des paysans (USP) a convoqué la presse pour énumérer les défis à venir. La réunion s’est déroulée ce vendredi matin sur l’exploitation d’élevage porcin de Samuel Schwab à Worb (BE). Les années se ressemblent, donc, mais les défis sont sans doute, cette fois-ci, encore plus importants que d’habitude, tant la pression est forte sur l’agriculture. Le menu qu’attend la profession sera en effet coriace avec notamment le message sur la politique agricole à partir de 2022 (PA 22+), l’accord de libre-échange avec le Mercosur ainsi que la votation sur les deux initiatives «Pour une eau potable propre» et «Pour une Suisse libre de pesticides de synthèse».
Approche uniforme peu judicieuse pour PA 22+
Francis Egger, en charge du Département Economie, formation et relations internationales de l’USP, a concentré son discours sur la PA 22+. Il a rappelé l’objectif de cette dernière qui consiste «à doter les secteurs agricole et agroalimentaire suisses de moyens leur permettant de saisir les chances qui s’offrent à eux de manière plus entrepreneuriale, d’augmenter la valeur ajoutée sur le marché, de renforcer l’efficience des exploitations, ainsi que de continuer à réduire l’impact environnemental et l’utilisation des ressources non renouvelables».
Si le responsable a félicité le fait que le soutien financier semble assuré pour la période 2022 à 2025, avec un budget total de 13,915 milliards de francs, il s’inquiète de la stratégie de réduction pour les excédents d’azote et de phosphore. Ceux-ci devront diminuer d’au moins 10 % d’ici à 2025, et d’au moins 20 % d’ici à 2030. «Les trois unités de bétail que peuvent garder les agriculteurs par hectare à l’heure actuelle passeront à 2,5, a relaté Francis Egger. Nous comprenons certes l’idée qui se cache là-derrière, mais une prescription aussi uniforme n’est pas très judicieuse au vu de la diversité topographique de la Suisse et de la répartition des productions.»
Initiatives jugée «trop extrêmes»
L’autre point majeur de cette année qui débute est bien la votation sur les deux initiatives «Pour une eau potable propre» et «Pour une Suisse libre de pesticides de synthèse». Pour l’USP, à l’heure actuelle, l’agriculture produit ce qu’achète la population, et c’est donc cette dernière qui est en mesure de déterminer la production. «La Suisse pourrait déjà être un pays 100% bio si tout le monde achetait des produits issus de l’agriculture biologique, a déclaré Martin Rufer, responsable Division Economie animale. Or ce ne sont pas les agriculteurs qui freinent ce secteur. Ce n’est pas de notre faute si le bio, qui représente environ 10% du marché, reste une niche.» Si ces deux initiatives viennent à passer, croire que tout le monde ne voudra aussitôt consommer plus que des produits bio et sera prêt à payer davantage «relève de la chimère», selon l’USP.
Elle estime ainsi qu’avec une acceptation de ces initiatives, «la production indigène chutera, et les produits conventionnels vendus à l’heure actuelle se verront importés». Elle pointe du doigt le risque que certaines exploitations disposant de cultures où la protection des végétaux revêt une grande importance, comme les cultures arboricoles, maraîchères ou viticoles, ainsi que celles spécialisées dans l’élevage porcin ou avicole, pourraient par exemple décider de renoncer complètement aux paiements directs, et donc opter pour une stratégie qui sera au final contreproductive.
«Oui au libre-échange, mais…”
Enfin, l’accord de libre-échange avec le Mercosur, soit le Brésil, l’Argentine, le Paraguay et l’Uruguay, constituera un énième défi. Il représente une forme d’antithèse des deux initiatives, selon l’USP, tant, dans ce cadre, «la Suisse «officielle» fait peu état de la durabilité et de la protection des animaux». L’organisation fait ici référence aux conditions de production des aliments en Amérique du Sud jugées beaucoup moins exigeantes dans cette région du monde qu’en Suisse.
«Si elle ne veut pas se retrouver submergée par de suspectes importations bon marché, l’agriculture suisse ne peut se passer d’une certaine protection douanière», s’est pour sa part inquiété Jacques Bourgeois, directeur sur le départ de l’USP. L’organisation paysanne ne se dit pas contre des accords de libre-échange, mais elle ne veut pas que l’agriculture «serve de monnaie d’échange pour les autres intérêts de l’économie suisse».
AGIR