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France - Interdiction des néonicotinoïdes au 1er septembre
29.08.2018 – Ces substances s'attaquent au système nerveux des insectes pollinisateurs et déciment des colonies entières d'abeilles. Les planteurs de betteraves sont inquiets pour leur avenir…
(ATS/AGIR) - En France, les planteurs de betteraves s'estiment injustement concernés par l'interdiction des néonicotinoïdes au 1er septembre. Selon eux, cette décision "idéologique" mettrait la filière du sucre "en péril" faute d'alternatives opérationnelles. "Les néonicotinoïdes, c'est la solution la plus propre qui existe à ce jour", tranche Eric Lainé, président de la Confédération générale des planteurs de betteraves, qui représente la majorité des 26'000 exploitants en France. Depuis 1992, la filière a réussi à vaincre le puceron vert, vecteur du virus de la jaunisse, par l'utilisation de cet insecticide enrobé sur la semence, qui agit pendant 90 à 100 jours. La loi sur la biodiversité de 2016 prévoit l'interdiction des néonicotinoïdes à partir du 1er septembre, avec des dérogations possibles jusqu'au 1er juillet 2020, car ces substances s'attaquent au système nerveux des insectes pollinisateurs, décimant des colonies d'abeilles. "On est en train d'interdire un produit pour protéger les abeilles mais elles ne vont pas sur les betteraves. On se demande vraiment pourquoi on nous attaque là-dessus alors qu'on risque une perte de rendement", s'interroge Thomas Gorge-Hautavoine, qui exploite 85 hectares de betterave sucrière à Warmeriville (Marne). Mais quid du risque de diffusion des néonicotinoïdes dans les sols des cultures voisines ? "L'insecticide est autour de la graine et, par l'humidité, se répand autour de la betterave, qui va le pomper pour le faire circuler dans la sève et les feuilles, c'est tout", argumente Eric Lainé, qui estime que les quantités dans le sol sont "infinitésimales".
Pour compenser l'interdiction de ce produit, l'Agence nationale de sécurité sanitaire (Anses) prône l'utilisation d'un insecticide foliaire, le Karate K, mais "cette alternative n'est pas efficace car il y aura encore plus de résistance" au puceron, estime Alexandre Quillet, le président de l'Institut technique de la betterave (ITB), organe institutionnel de la filière de la betterave à sucre. En outre il nécessite une pulvérisation aérienne, avec des conséquences néfastes sur "les auxiliaires comme les coccinelles et autres insectes qui sont utiles". Sans solution efficace contre le puceron vert, la perte de rendement sera "au moins de 12% en moyenne au niveau national, sur plusieurs années", et jusqu'à 50% sur une parcelle, estime l'ITB.
"Il y a une position idéologique du gouvernement d'essayer de faire disparaître les produits phytosanitaires les plus dangereux, sans discernement", dénonce Eric Lainé, qui demande une dérogation de deux ans, le temps d'adapter les modes de production. D'autant qu'une baisse de rendement, dans un contexte de chute des cours mondiaux du sucre, pourrait mettre à mal les exploitations, selon Alexandre Quillet, qui craint que la filière soit "mise en péril".
En Suisse, l'Office fédéral de l'agriculture a décrété en mai dernier une interdiction partielle de trois néonicotinoïdes. Le recours à ces pesticides doit être limité aux usages en serre. Quant aux usages en plein air, ils seront interdits à partir de fin 2018. Selon le rapport annuel 2017 de la Fédération suisse des bettraviers (FSB), 19'649 hectares sont consacrés à la culture de la bettrave sucrière. Seuls 21 hectares, soit 0,001%, sont consacrés à la betterave bio. Au total, 1'545'112 tonnes de bettraves ont été récoltées l'an dernier dans nos champs.
Auteur : ATS/AGIR
